Chuunibyou Luciano Valente est fils d’une ancienne famille Italienne vivant en Amérique depuis peu. A présent bien ancré dans la culture Américaine, la famille Valente n’a gardé d’Italien que le nom et un certain accent. Cependant, Luciano, par un malheureux hasard scénaristique, a visionné les trois films de Coppola, Godfather, alors qu’il était en quatrième et, de fait, sujet à la Chuunibyou. Bien entendu, le raccourci est vite emprunté par ce chétif petit garçon, véritable tête turc de la classe : « Je suis italien. Le Parrain est italien. Il s’est fait humilier et victimiser durant son enfance, moi aussi. Je suis donc un Parrain ».
Les enfants, surtout en quatrième, peuvent parfois se mettre d’incroyables idées dans la tête, compétemment aberrantes, pour des raisons tout aussi loufoques. C’est bizarre, un quatrième.
Ni une ni deux, le voici qui vient, endimanché comme jamais, portant le chapeau et la canne, dans le collège du quartier italien de Hatfield. Ces habituels bourreaux, hilares, ne manquèrent pas de dénicher de nouveaux quolibets à son égard. Cependant ils s’arrêtèrent très vite quand il se mit à proposer à ses camarades de classes des « prêt de feuilles ». Vous savez, collégiens ou ex-collégiens, que les feuilles sont des denrées excessivement rares avec une proportion à disparaître à toute vitesse et c’est toujours quand vous avez un gros DS de math qu’il vous manque les 18 copies doubles nécessaires.
Aussi, profitant pleinement du travail de son père, gérant d’une papeterie, il se constitua un stock de feuille important et fonda la Valente’s paper. Cette organisation dont il était le seul membre consiste à donner des feuilles aux nécessiteux, qui le remboursaient avec un taux d’intérêt (assez faible, soit dit en passant).
Ses camarades, trop heureux d’être dépanné dans les pires moments de manque qui puissent exister en quatrième, oublièrent un temps le petit « piccolo stupido » comme il était surnommé est se prêtèrent au jeu de celui qu’ils appelaient dorénavant « l’Imprimeur ».
Cependant Luciano attendait en secret le jour où l’un d’entre eux abuserait de son système, car bien que plus respectueux, les autres de la classe ne le regardaient pas encore de la bonne façon pour un parrain mafieux : avec crainte. Et ce jour arriva, bien entendu.
A la suite d’un dst de science naturelle, il se dirigea vers un énorme élève, un des leaders de l’école, redoublant par deux fois, plus grand que la plupart des troisièmes et d’une bonne partie des lycéens. Un de ses pires ennemis.
« Mario, dit-il avec cette voix lente à l’accent prononcé qu’il avait dorénavant, cela fait plusieurs semaines que tu m’emprunte des feuilles pour les DS sans rien me rendre en retour. Je te rends service et ta dette augmente chaque jour. Il serait temps de penser à t’en acquitter. J’aurais justement besoin d’un petit service… »
L’autre le regarda avec un sourire bête et le bourra violemment. Envoyant valser le pauvre Luciano.
« Contente-toi de me filer des feuilles quand j’en ai besoin, Piccolo stupido, et je te ficherais la paix à la sortie. »
Il lui donna un violent coup de poing dans le ventre, et lui arracha une chaussure.
« Voilà un avertissement… »
Il lui vola l’autre.
« … et voilà ta punition pour m’avoir menacé. »
Et il le laissa seul, au sol et sans chaussure.
Mario ne vint pas le lendemain. Ni les jours qui suivirent.
Une rumeur circulait, comme quoi il fût retrouvé étranglé chez lui.
Et l’air entendu de Luciano Valente faisait froid dans le dos à quiconque le croisait.
***
Depuis ce jour, Luciano devint un parrain. Un vrai. En plus d’étendre son trafic de feuille à celui de stylo, marqueurs, gommes et autres, il rendait désormais des services à qui venait le supplier, et qui était prêt à en payer le prix.
Les autorités éducatives ne mettaient pas son nez dans ses affaires, notamment parce que son trafic s’étendaient aux craies, aux marqueurs, et aux cartouches d’encre de photocopieuse. Certains profs venaient même lui demander service, par exemple pour obtenir le calme dans leur classe.
Certains élèves bien avisés, souvent d’anciennes victimes, rejoignirent son organisation qui finit par devenir une véritable famille mafieuse. Ils ignoraient bien entendu tout des « avantages » de leur parrain, qui ne les utilisaient que subtilement.
Un autre fait marquant et très important de la « famille Valente » est connu sous le nom de « l’affaire du marchand de glace ». Un élève peu scrupuleux, fils d’un riche homme d’affaire, Marcus Manus, tenta de doubler Luciano. Il vint dans son bureau (une salle de classe désaffectée au dernier étage du collège) avec une étonnante requête :
« Parrain, je suis un de tes plus fidèles dépositaires : j’ai toujours restitué les feuilles que je t’ai emprunté. J’ai aidé lors de l’opération visant à soudoyer le gardien qui avait grillé deux de tes hommes la nuit dans le collège. Je viens vers toi car j’ai un service à te demander : J’ai eu quelques griefs avec un marchand à glace, qui propose des prix exorbitants. J’aimerai racheter son affaire, afin de permettre aux étudiants de profiter de prix raisonnable et des meilleures glaces à l’italienne. Cependant il n’est pas prêt du tout à vendre, certainement pas à un mineur. Je sais que tu as le syndicat des élèves dans ta poche, si tu proposais, officiellement, que j’en fasse partie et que l’affaire soit considéré comme une organisation ludique, dont nous soumettrons l’idée au proviseur… »
Luciano réfléchit longuement, du moins c’est ce qu’il laissait paraître, le temps que son interlocuteur soit suffisamment mal à l’aise.
« Tu voudrais que le syndicat propose une organisation de vente de glace comme il a proposé la vente de chocolat ou le spectacle de fin d’année ? »
« C’est cela, mon parrain ».
« Alors qu’en vérité tu veux que l’affaire t’appartiennent complétement, et que tu touches toute la recette ? »
« Je… Je… je n’ai pas forcément… »
« Si tu étais venu ici en me traitant comme ton véritable parrain, comme un membre de ta famille, ce marchand de glace aurait déjà cédé son affaire. Mais tu viens là en me considérant comme un vulgaire chef de gang qui cherche à s’enrichir. »
Il se leva et présenta sa chevalière, que Marcus s’empressa de baiser.
« Cela fait longtemps que ce marchand de glace me pose problème, il pratique un commerce illégitime et ruine les braves collégiens, les membres de ma famille. Cet Infada ne mérite pas son commerce. »
Il réfléchit un instant et conclut :
« Tu géreras cette affaire, mais je m’occuperais d’en fixer les prix. Tu verseras un tiers au syndicat, et un tiers à la famille. En échange tu toucheras le tiers restant et tu n’auras rien à dépenser pour le racheter. »
Comprenant que l’entretien était clos, Marcus se leva. Il s’apprêtait à sortir quand il demanda :
« Et le marchand ? Comment allez-vous lui faire changer d’avis ? »
« Je lui ferais une offre qu'il ne pourra pas refuser. »
***
Ayant récupéré une certaine somme auprès d’un professeur qui accumulait les services non rendus, il acheta l’affaire pour 200 dollars. Personne ne sut comment il s’y était pris, mais personne ne revit le marchand dans le quartier. Personne ne le revit tout court d’ailleurs.
Marcus eu donc le privilège de servir des glaces à tous les collégiens de l'établissement : ses glaces à l'italienne surpassaient celles de son prédécesseur, un obscur américain de souche, et le syndicat était heureux de ce nouveau membre imprévu. Le proviseur avait accepté sans hésitation la proposition – il n'eut pas trop le choix – et personne ne sut rien du petit arrangement entre Marcus et Luciano.
Cependant Marcus ne respecta pas le marché. Il ne donna pas un sous pendant trois mois. Le 31 du troisième mois, Luciano se rendit chez lui, pour le découvrir en train de faire ses valises.
« On prend des vacances Marcus ? »
« Parrain ! je… Je n’ai pas… »
Il cacha prestement un portefeuille bien garni dans son sac, mais Luciano l'avait vu avant.
« Tu ne m’as pas respecté Marcus. Tu as cherché à profiter de moi. »
Il s’avança lentement du félon, la tête penché et le regard froid.
« Je sais tout de ta petite tentative. Tu cherchais à rejoindre Perrine, c'est cela ? »
« Comment... Comment sais-tu que... » mais Luciano l'interrompit, continuant à s'approcher.
« Cette chère Perrine... Partie au Québec... Tu étais fou d'elle, n'est-ce pas ? Quel déchirement pour toi... Et bien entendu, tout riche que tu étais, tes parents refusèrent de financer un tel voyage. »
« Parrain, je vous jure... »
« Il te fallait de l'argent liquide, et rapidement. Tu as amassé une petite somme, dont deux tiers ne t'appartient pas. Tu as cherché à me rouler, Marcus. »
A présent, il pouvait sentir son souffle sur son visage, plonger son regard dans l'abîme sans fond de ses yeux...
« Je t’ai traité en ami, en frère, et tu ne m’as pas respecté. « asséna-t-il comme phrase finale.
Marcus ravala sa salive, puis se dégagea de l'étreinte vampirisante de son interlocuteur.
« Ça suffit Luciano, répondit Marcus, changeant soudainement de ton en se ressaisissant. Arrête avec ton petit cirque, je ne sais pas comment tu te débrouille mais tu n’effraie personne. Allez, laisse-moi pass… »
Soudainement un homme en costume trois pièce surgit de sous son lit, une arme braquée sur sa tempe.
« Je ne te fais pas peur, Marcus ? Et lui, il ne te fait pas peur ? »
Tétanisé, Marcus ne savait quoi répondre.
« Tu es Italien, je ne vais donc pas te tuer. Mais en effet, tu vas partir. Je récupère l’affaire, ton argent, et je ne veux plus te voir dans cette ville. »
Comprenant qu’il n’avait pas le choix, il vida ses poches sur la table, lui donna son portefeuille avec des mains tremblantes, et quitta la maison presque en courant. Luciano le regarda par la fenêtre de sa chambre, tourner au coin de la rue, attendit quelques secondes pour le voir mollement s'affaisser sur le bitume, les yeux vides.
***
A partir de ce jour la famille Valente commença à gagner de l’argent et ce fut le début de la prospérité. S’étendant sur tout le quartier Italien, puis dans tout Hatfield, faisant de sa spécialité les loisirs étudiants. Tous les lycées et collèges accueillaient un comptoir de la Valente’s paper. Tous les syndicats des élèves lui transmettent des informations et toutes les organisations étudiantes sont financées par la famille. Le cinéma, les marchands de glace, lui appartiennent. Mais il s’est aussi étendu à d’autres établissements moins « adolescents ». Il a ses contacts à la police, à la Mairie, bref c’est un Parrain accompli. Il contrôle même la luxueuse maison de retraite dans laquelle ses parents coulent des jours heureux, parfaitement inconscients du statut de leur fils et bien contents d'être complétement pris en charge à 60 ans. Ainsi, il s'assure de ne pas être dérangé par un résidu d'autorité parentale.
Il est également conscient de l’existence des éveillés, et participe dans l’ombre à maintenir une certaine cohésion au sein de ce « peuple de surhomme ». Ses informateurs son précieux pour la Mairie afin de suivre l’évolution de chacun, et certains ont même rejoint ses rangs. A ce jour c’est le domaine qui présente le plus d’intérêt pour lui…
PouvoirLes pouvoirs de Luciano ne sont pas très clair. Il s'agit d'un éveillé, cela reste certain, mais son chunnibyou s'étend à un milieu ayant réellement existé : Aussi sont-ils moins flagrants que des pouvoirs de personnages « imaginaires ». Ce n'est pas un Super-héros, ou un Super-vilain.
En vérité ses pouvoirs viennent « faciliter » son statut de mafieux. Il s'agit principalement de pouvoirs d'ambiance, de mise en scène, qui viennent sublimer son rôle. Il n'a pas à les invoquer en prononçant des noms incompréhensibles, ils agissent passivement.
Un exemple : Luciano est toujours entouré de gardes du corps. Ils peuvent être à ses côtés ou cachés dans des lieux randoms, ils peuvent être réels ou non, mais il sera TOUJOURS défendu par quelqu'un – point.
Chacune de ses paroles impose une tension à son interlocuteur, même s'il est surpuissant ou immortel. C'est le Parrain, et le Parrain ne dit rien qui ne soit soupesé et inutile.
Une autre capacité du Parrain, est de rendre chaque lieu propice à son besoin. Un entrepôt désaffecté, une salle de théâtre huppée, considérez qu'il puisse transformer n'importe quoi en scénarum. Toutes ses actions sont dignes d'une scène de film est tout est mis à disposition – il est même possible que vous vous retrouviez maquillé comme un comédien si vous lui parlez sous la lumière blafarde d'un lampadaire afin de ne pas rendre votre teint trop pâle et ainsi décrédibiliser la scène.
De même, il ne sera jamais à court de petite coupure. Ça a son avantage.
Comprenez bien : il peut mourir. Mais il reste du début à la fin un personnage de film.
Ses autres capacités tiennent moins de ses pouvoirs que de son actuel statut. Luciano a la main mise sur une bonne partie de la ville, à presque tous les niveaux. Il sait ce qu'il s'y passe, il connaît chaque personne qui en vaille la peine, il possède la moitié des établissements privés, a des contacts parmi les autorités, est couvert par la police, gère une bonne partie de la pègre...
Néanmoins, un parrain se doit d'avoir des rivaux. Avec son éveil, c'est toute une pègre mafieuse qui est apparue dans Hatfield, et d'autres Famille se dispute le pouvoir. Luciano n'est pas tout puissant. Mais ne lui causez pas de tort, car à défaut de vous tuer, il peut faire de votre vie un enfer – n'oubliez pas qu'il peut vous empêcher d'avoir un job, ou vous calomnier dans la presse (il possède trois des cinq journaux locaux) ou encore cibler vos amis et proches. Bref ne lui chercher pas des noises si vous tenez à votre vie sociale.